header-hifi-group-blog

Blog

actu doublage IA

IA vs Cinéma

02/05/2024
Quitte ou double

S’il y a bien quelque chose à retenir de la grève qui a mobilisé/paralysé le tout Hollywood cent dix-huit jours durant il y a quelques mois, c’est que le monde du cinéma se fait pas mal de mouron ces derniers temps, et notamment concernant la colonisation du métier par l’intelligence artificielle générative. Scénaristes et acteurs se savent sérieusement menacés par les révolutions numériques galopantes de ces dernières années, et il semblerait bien que les premières victimes collatérales très palpables de ce « renouveau » cinémato-synthétique soient les comédiens de doublage. Pauvres dindons de la farce technologique, il se voient, au choix : usurper leur identité vocale pour entraîner la même IA qui causera leur perte, ou tout simplement évincés par les hologrammes vocaux et polyglottes des superstars du silver screen qu’ils comptent d’ordinaire dans leur voxographie. 

 

 

Imaginez vous un Brad Pitt par exemple, qui, en un coup d’algorithme magique, se met à parler - avec sa tessiture originale, s’il vous plaît - tous les dialectes du monde, et ce, avec les mouvements labiaux conformes à la prononciation de la langue en question. Incroyable n’est-il pas ? Peut-être, mais nous voilà face à un tour de passe passe logiciel sur le point de précipiter la chute de tout un corps de métier. Car si l’alter ego francophone du Bradou en question, à l’instar de bon nombre de ses collègues ayant connu leur heure de gloire dans les décennies passées – les De Niro, DiCaprio, Stallone et autres Meryl Streep - est encore bien identifié par l’inconscient collectif, les futures têtes de gondoles du star system sont tout à fait susceptibles de tromper – malgré elles - leur monde de la sorte. 

Une manne inépuisable, que les avocats du Diable auront vite fait de qualifier de révolutionnaire, ouvrant la porte à tous les fantasmes : ressusciter les morts – tel le Warhol voix off d’outre tombe du reportage Netflix « The Andy Warhol Diaries » - exporter bien plus facilement les œuvres non anglophones – l’allergie épidermique au sous-titrage de l’américain moyen étant bien connue – et, bien évidemment, produire plus, plus vite et pour bien moins cher – puisque que recourir à une IA de dubbing plutôt qu’à un être fait de chair et de sang est environ dix fois moins onéreux. 

 

 

La défiance bien française envers la langue de Shakespeare se traduit par une consommation majoritaire des films et séries dans leur version frenchie dans l’hexagone, et le développement subséquent d’un véritable savoir faire en la matière depuis les fifties. Reste donc à savoir si le public français est prêt à sacrifier sur l’autel d’un soit disant réalisme orthophonique plus de 7000 emplois, et à se passer des petits bonbons de kitschitude que sont les nanars vintage au doublage approximatif et franchement hilarant.  

Face à la fulgurance du développement du procédé pré-cité, le milieu a fait preuve de la réactivité d’un gastéropode. Sans doute parce que jusqu’à présent, l’humain s’était auto-persuadé que l’Art et ses subdivisions étaient hermétiques au grand remplacement technologique, pensant naïvement que seules les taches éreintantes seraient confiées aux machines, laissant aux mortels tout le loisir de la création artistique. Et bien il semblerait que non, en fin de compte. Tremblez, belles plumes et joli brins de voix, votre tour viendra… 

 

Retour